Je ne connais personne qui n’aime pas les chutes. Petites ou spectaculaires, les chutes nous attirent par leur mouvement et leur environnement sonore. Pour le photographe, les chutes sont également source de photographies intéressantes. Mais pour en tirer le meilleur il faut avoir recours à quelques techniques particulières.
Tout d’abord, il faut idéalement un trépied. Photographier une chute avec les vitesses d’exposition nécessaire pour photographier à main levée donne souvent des résultats décevants. Le trépied permet alors de choisir des vitesses assez lentes pour donner un effet « laiteux » à l’eau courante. Quelle vitesse choisir? Tout dépend en grande partie de la dimension de la chute : les plus importantes, celles qui tombent de plus haut ou qui ont un plus grand volume d’eau, n’ont pas besoin d’une vitesse d’exposition aussi lente qu’un petit rapide bondissant entre les roches d’un petit ruisseau. Idéalement, on tentera plusieurs vitesses d’exposition différentes pour en observer les effets sur l’image. Typiquement, on peut dire que l’exposition idéale commence autours de 1/8 de seconde et peut s’allonger jusqu’à une trentaine de secondes.
Dans certaines conditions de lumière il sera parfois impossible de baisser la vitesse à des valeurs aussi lentes sans utiliser un filtre de densité neutre. Je préfère un filtre de 1000x qui coupe 10 stops de lumière. Si la vitesse devient trop basse, il suffira alors de monter légèrement l’ISO ou d’ouvrir un peu le diaphragme par rapport à la valeur de base utilisée pour les chutes et qui tourne autour de f/16 ou f/22.
Un autre filtre à utiliser, avant même de sortir le filtre densité neutre, demeure le polariseur. Un polariseur permet de réduire ou éliminer les reflets sur les roche mouillées et d’augmenter la saturation de l’image. En plus, le polariseur permet déjà de réduire la vitesse par un cran et demi. Pour les vitesses les plus longues, il m’arrive souvent d’utiliser les deux filtres montés l’un sur l’autre, le densité neutre et le polariseur, pour ainsi contrôler les réflexions et obtenir la vitesse la plus lente possible.
Le meilleur moment pour photographier les chutes demeure une journée nuageuse. La plupart des chutes se retrouvant en milieu forestier, une journée ensoleillée résulte souvent en un éclairage où se retrouvent des zones trop claires et des zones d’ombres noires. Une journée nuageuse donne un éclairage plus uniforme. Dans d’autres circonstances, photographier très tôt ou plus tard, lorsque le soleil est plus bas sur l’horizon, peut également s’avérer intéressant; selon l’orientation de la chute, celle-ci peut se retrouver entièrement à l’ombre. Mais si les circonstances font en sorte qu’il faut absolument photographier la chute dans une lumière contrastée on peut toujours utiliser la fonction HDR que l’on retrouve sur la plupart des appareils actuels. Pour ce qui est des saisons, les meilleures sont souvent le printemps, lorsque le niveau d’eau des rivières est au plus fort, et l’automne, qui connaît également certains épisodes de niveau d’eau plus élevé en plus d’avoir l’avantage du feuillage coloré.
Lorsque j’approche une chute pour en faire quelques photos, je commence toujours par un plan général incluant la totalité de la chute. Ces premières images sont souvent réalisées à l’aide d’un grand angle. Si la situation s’y prête, j’essaie de me rapprocher et d’inclure des éléments de l’avant plan, quelques rochers ou une partie de l’eau. De telles situations sont toutefois assez rares. Le plus souvent, il faudra se contenter d’un ou deux points de vue, souvent plus haut sur la berge. Une fois ces premières images réalisées je troque souvent le grand angle pour un zoom télé pour chercher des compositions plus serrées. Dans les situations où la chute est partiellement ensoleillée photographier des portions plus petites permet souvent de trouver des zones qui seront entièrement à l’ombre ou au soleil, éliminant d’emblée les difficultés liées au contraste de l’éclairage.
Christian Autotte
LES PHOTOS
Ces deux photos illustrent bien l’effet de la vitesse choisie sur l’image d’une chute. Une vitesse plus lente donne un meilleur effet sur l’eau courante.
Olympus OMD E-M1 Mark II, 12-40 à 17mm, 1/20 à f/9.0, ISO 400
Olympus OMD E-M1 Mark II, 12-40 à 17mm, 1/3 à f/16, ISO 200
Une journée nuageuse a donné un éclairage uniforme pour photographier la Chute aux Rats du parc du Mont-Tremblant.
Olympus OMD E-M1 Mark II, 12-40 à 36mm, 1/1.3 sec à f/16, ISO 64
La même chute photographiée durant une journée ensoleillée a été traitée avec un logiciel HDR pour conserver de l’information à la fois dans les zones claires et sombres de l’image.
Canon 7D, 17-40 à 29mm, f/11 de 5 à 20 secondes, montées avec logiciel HDR, ISO 100
La même chute a également donné bon nombre de photos de détails plus rapprochés.
Canon 7D, 100-400 à 100mm, 1.3 sec à f/22, ISO 100
Canon 7D, 100-400 à 210mm, 0.8 sec à f/22, ISO 100
La Chute aux Mûres, toujours dans le parc du Mont-Tremblant. En changeant d’angle et de longueur focale on peut multiplier les images qui peuvent être très différentes les unes des autres.
Olympus OMD E-M1 Mark III, 12-40 à 12mm, ¼ sec à f/11, ISO 400
Olympus OMD E-M1 Mark III, 12-40 à 40mm, 0.6 sec à f/16, ISO 200
Sans nécessairement faire du HDR, si on surveille les niveaux de l’image pour éviter de perdre des informations aux deux extrémités de l’histogramme il sera généralement possible de tirer une image très acceptable même en éclairage contrasté.
Canon 20D, 18-55 à 50mm, 0.6 sec à f/22, ISO 100
La Chute Roland, réserve de La Vérendrye, par une belle journée ensoleillée…
Olympus OMD E-M1 Mark II, 40-150 à 57mm, 0.5 sec à f/16, ISO 100
…Lorsque l’angle du soleil est juste parfait, on peut souvent voir l’apparition d’un arc-en-ciel à même la chute.
Olympus OMD E-M1 Mark II, 40-150 à 100mm, 1/5 sec à f/16, ISO 100
Un paysage d’automne ne peut qu’augmenter l’attrait d’une chute. Chute Parker, Parc de La Mauricie.
Olympus OMD E-M1 Mark II, 12-40 à 40mm, 0.5 sec à f/16, ISO 200
Les chutes sont parfois à peine plus qu’un ruisseau dévalant une pente un peu abrupte… Parc de La Mauricie.
Olympus OMD E-M1, 12-40 à 14mm, 1.3 sec à f/16, ISO 200
Un angle bas et la bonne optique ont donné plus d’importance à ce petit ruisseau.
Olympus OMD E-M1 Mark II, 40-150 à 75mm, 1.6 sec à f/16, ISO 200
Les chutes ne sont pas l’apanage de l’Amérique-du-Nord. J’ai photographié cette chute spectaculaire lors d’une randonnée au Costa Rica.
Canon 40D, 17-40 à 22mm, 1/10 à f/20, ISO 100
En incluant des personnes qui se baignaient dans le bassin au pied de la même chute j’ai pu ajouter une idée de ses dimensions.
Canon 7D, 10-20 à 16mm, 1/10 à f/16, ISO 250
Dans la réserve du Saint-Maurice je suis tombé sur un groupe d’escaladeurs s’amusant à descendre au milieu d’une chute. Ce genre d’occasion est plutôt rare.
Canon 6D, 17-40 à 39mm, 1/10 sec à f/11, ISO 100
La Chute Roland de la réserve de La Vérendrye photographiée avec un appareil DSLR modifié pour faire de la photo en infrarouge. Avec un peu de travail en post production on peut créer des images hors de l’ordinaire.
Canon 7D infrarouge, 17-40 à 19mm, 1/1.3 à f/22, ISO 100
Avec un autre appareil modifié pour l’infra-rouge, j’ai opté pour une image noir-et-blanc. Chute Quinn, à l’entrée de la réserve de La Vérendrye.
Canon 7D infrarouge, 17-40 à 22mm, 1/1.6 à f/22, ISO 100
Si la plupart des gens visitent les chutes durant la belle saison, rien n’empêche d’aller jeter un coup d’œil au début de l’hiver… Les Chutes de Plaisance ont un bon débit et coulent à l’année longue.
Canon 7D, 17-40 à 21mm, f/22, de 1/13 à 25 sec, monté en HDR avec logiciel, ISO 100
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